du 23 février 2007

 « En ce jour symbolique, nous devons

internationaliser la solidarité »  -Renaud

 

Ce soir, vous ouvrez votre tournée à Caen par un concert de solidarité avec Ingrid Betancourt. Quel sens, donnez-vous à votre démarche ?

Renaud. Un journaliste me faisait remarquer que c’était dommage que je ne puisse pas être au Mémorial de Caen où, quasiment à la même heure de mon concert pour Ingrid Betancourt, il y a aussi une belle action, avec une exposition sur la Colombie, sur les otages, sur Ingrid et une allocution de Florence Aubenas, avec la municipalité qui est impliquée. J’ai répondu qu’une action ne faisait pas de l’ombre à l’autre. Elles se cumulent. À chaque fois, c’est une goutte d’eau dans l’océan de solidarité. Durant mon concert - en dehors du fait que c’est la première de ma tournée, avec un nouveau tour de chant et un nouveau répertoire - il y a aura des intervenants avant le concert mais aussi au milieu de mon spectacle, juste après ma chanson spécifique sur le cas des otages Dans la jungle avec notamment Fabrice, le père des enfants d’Ingrid, son fils Lorenzo et différentes personnalités qui viendront s’exprimer. J’ai tenu à ces moments dans mon spectacle pour sensibiliser une fois encore, d’une manière encore plus large, l’opinion publique, les médias, les personnalités de tous horizons, les artistes, le public. Au moment où l’on célèbre malheureusement le cinquième anniversaire de l’enlèvement d’Ingrid, c’est une manière de dire qu’il ne faut pas baisser les bras, ne pas céder au désespoir et à la résignation. Nous devons continuer à nous battre, et plus particulièrement en ce jour symbolique, pour non seulement bousculer la classe politique en France, mais également pour internationaliser la solidarité.

Qu’est-ce qui vous émeut dans le combat d’Ingrid Betancourt ?

Renaud. Cette femme a lutté, sans avoir une goutte de sang sur les mains, de la manière la plus belle qui soit. C’est-à-dire par les armes de la parole et des mots, par le biais de la politique, de la diplomatie, du débat, du militantisme non violent à travers les élections. Elle a été députée, sénatrice, elle était candidate présidentielle et luttait contre la corruption, la misère, la violence, contre le narcotrafic en Colombie. Elle a payé son engagement, ce combat magnifique, par cinq ans d’emprisonnement. C’est une femme honnête, intègre, combative, voilà ce qui m’émeut.

Au côté de personnalités tels Robert Hossein, Alain Delon ou encore Alain Decaux, vous faites partie d’un collectif d’artistes (1) créé début février afin d’appeler le gouvernement à « un engagement plus ferme »

Renaud. J’ai rejoint la position de la fille d’Ingrid, Mélanie Delloye, qui considère, à mes yeux à juste titre, que le gouvernement français s’est contenté de belles paroles, de solidarité, d’empathie, de compassion, mais n’a pas eu l’influence qu’il pourrait avoir et auprès de la Colombie et auprès de l’Union européenne et auprès des États-Unis, qui on le sait, sont souvent dans ce genre de région, les maîtres du jeu. Dans cet esprit Mélanie a écrit un manifeste demandant aux candidats à la présidentielle en France, de dire publiquement ce qu’ils envisageaient de faire pour la libération d’Ingrid.

Quels sont les candidats qui ont - signé ce manifeste ?

Renaud. Pour le moment Arlette Laguiller, Dominique Voynet et Marie-George Buffet l’ont signé. François Bayrou s’est engagé à faire tout ce qui serait en son pouvoir pour faire respecter cette charte manifeste. Ségolène Royal, Mélanie devait la rencontrer hier. Et Nicolas Sarkozy s’est également engagé, ce qui personnellement me fait un peu rigoler, puisqu’il a fait partie pendant cinq ans d’un gouvernement qui n’a rien fait, à part de belles déclarations.

(1) Appel de « 100 artistes et écrivains contre la mort d’Ingrid Betancourt » soutenu notamment par Renaud, Alain Chamfort, Alain Delon,Jean-Claude Brialy, Philippe Toreton, Marc Levy, Alain Decaux...

Entretien réalisé par Victor Hache                                                                                                        L'HUMANITE du 23/02/2007  

Ingrid

Renaud