DeTRESSE DE FEMME …

                           ….Fierté d’une mère !

 

Six heures trente….

Le réveil me tire d'un sommeil agité. Je cherche à reprendre mes esprits, à me souvenir ce qu'a été ma journée d'hier, gymnastique difficile et quotidienne.
Derrière moi, un trou noir !
Qu'ai-je pu dire ou faire ? Je ne sais plus, tout est si flou.
Dans la nuit, vers 2 heures du matin, il m'a fallu descendre et boire pour tenter d'étancher la soif qui me torture.
La nuit, j'ai toujours la bouche pâteuse la nuit. C'est difficile à supporter et surtout, ça brise mon sommeil pour de longues heures. Il n'y avait plus de bière, alors j'ai bu du lait, beaucoup de lait.
Je me lève dans trop de difficultés, je n'ai pas mal à la tête, je n'ai jamais mal à la tête et je ne suis pas nauséeuse.

Je réveille les enfants doucement, à cette heure, ils ont encore une mère.
Aujourd'hui, je ne boirai pas. Je me le suis promis hier soir.

Je fais le café et les enfants prennent leur petit déjeuner.

Dans la salle de bain, je jette un oeil rapide sur le miroir, j'ai les yeux cernés, mes cheveux sont ternes. Hum, pas beau tout ça !
Je ne supporte pas l'image que me renvoie le miroir et je détourne bien vite la tête.
"Tout compte fait, je vais conduire les enfants à l'école et je passerai au magasin acheter quatre bouteilles de bière forte.

Je ne vais pas m'arrêter aujourd'hui, je ne me sens pas prête.

Où vais-je aller en courses ? Il ne s'agit pas d'aller dans un supermarché où je suis déjà allée
hier sinon la caissière va se poser des questions. Je ne veux pas qu'on sache !"
Je me sens moche, sale.

J'irai à Auchan c'est plus impersonnel et il y a moins de risque que je me fasse remarquer. Sur la route, il faudrait que je jette les cadavres que j'ai accumulés depuis deux jours. Il y en a partout : derrière la machine à laver, dans la machine à laver, dans le panier à linge sale !

 Oh ça commence à "sentir vraiment mauvais" !
Pour sortir discrètement de la maison avec toutes ces bouteilles, je les dépose dans le panier à linge que je recouvre délicatement d'un drap de bain, personne ne doit entendre. Je prends d'infimes précautions pour le déposer dans le coffre de la voiture.

Je dépose les enfants à l'école en faisant bien attention de rouler doucement pour que les bouteilles ne se s'entrechoquent pas. J'arrive à la benne, jette un oeil circulaire à l'horizon afin de m'assurer
que personne n'arrive et là... je fonce ! Ce n'est pas le moment de traîner.
Au supermarché, je remplis mon caddie. Il n'est pas question de ne passer en caisse qu'avec de l'alcool. Dans les allées et aux caisses, je vérifie qu'aucune tête connue n'est là en même temps que moi.
Arrivée à la maison, je planque de suite ma honteuse cargaison que je cache un peu n'importe où. J'ouvre très vite une bouteille et je me sers un premier verre puis je décharge les courses. Quand les enfants reviennent de l'école le midi, je suis déjà bien "fatiguée". - Je ne me sens pas bien. Le repas est prêt. Je vais aller m'allonger un peu. En partant à l'école, vous fermerez la porte et le portail à clé ?
Si on téléphone, vous dites que je suis partie en courses.

Merci. Passez une bonne après-midi."
Je reste au lit jusqu'en début de l'après-midi. J'ai débranché le téléphone. Je dois me montrer prudente car on pourrait réaliser en m'entendant parler que j'ai bu.
Je me lève vers 15 heures. J'ai soif. J'ouvre une autre bouteille et je me mets en pyjama. J'ai beaucoup grossi. Je n'ai plus qu'une seule tenue, usée, défraîchie et trop ajustée. La bière m'a fait gonfler et je suis serrée dans mon pantalon.
Les enfants reviennent de l'école les uns après les autres. Aucun ne me pose de questions.
Je prépare le souper tout en aidant les enfants à leurs devoirs. J'ai un verre de bière caché derrière la cafetière. La bouteille est sous le lavabo et régulièrement je remplis le verre.
Le ménage n'est pas fait, le courrier est en attente depuis des mois, des années. Je ne fais que le minimum. J'essaye de ne pas penser à tout ce retard accumulé qui rajoute à mon mal.
"- zut ! j'ai fini la dernière bouteille et je ne suis pas en état de conduire..."
Il ne me reste qu'une solution : demander à ma fille ou mon fils d'aller me chercher une ou deux bouteilles pour pouvoir aller jusqu'au soir.
Ils ne sont pas chauds. Ils ne sont jamais chauds d'ailleurs. Ils savent que je me fais du mal mais ne veulent pas me faire de peine. J'insiste et je monnaie la course. Je finis par obtenir gain de cause sans omettre de les remercier. je leur demande de la discrétion car si leur père est là quand ils
reviennent car il n'aime pas que je consomme de la bière. Ils savent, ils feront attention.
Je me dépêche de mettre un semblant d'ordre pour sauver les apparences au retour de mon mari.
Voilà. Tout n'est pas dit. Je ne prenais mes rdv que le matin car le soir.. il n'y avait plus personne !
Et puis, il y avait les imprévus tel qu'un enfant malade où malgré mon état, il me fallait soit appeler le médecin, soit y aller... Là, je m'efforçais de manger quelque chose pour tenter d'absorber un peu
du poison qui coulait dans mes veines, dans ma tête. Je me brossais les dents et surtout, face à quelqu'un je prenais soin de peu parler et de garder la bouche fermée.

C'est en janvier de cette année 2001, après dix ans de ce mauvais traitement que je me suis infligée, qu'un soir, plus désespérée que les autres, j'ai appelé au secours ma soeur au téléphone. Je lui ai tout dis. Ma fierté ne me servait plus à rien, fière de quoi ? De ce que j'étais devenue ?
J'avais touché le fond. J'ai consulté un médecin qui ne me connaissait pas et compris en sortant de la consultation qu'il ne me fallait pas aller chercher "une dernière fois" ce breuvage maudit

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