Le retraite et le cocon

 

            Voilà, c'est officiel maintenant: " C'est la RETRAITE !!! "

             Certes , le 11 septembre 1948 ne sera pas  dans les livres d'Histoire comme ceux de 1973 ( ou Il pleuvait sur Santiago) ou celui de 2001  ( ou deux 747 qui se sont écrasés dans les Tours  Jumelles  créant ainsi le tristement célèbre Ground Zéro ) mais c'est ma date de naissance et elle me permet de prétendre à la liquidation des droits à la retraite 

            En même temps, cela me rappelle qu'il y a trois ans , je sortais d'un COCON ou je m 'étais volontairement  installé ,quoique un  petit peu poussé par une lettre du fiston, pour 2 mois.

             Mais d'abord, et c'est un message d'espoir pour les plus jeunes , si je  peux partir à 55ans à la retraite, c'est que rien n'étant jamais acquis d'avance,  des luttes sont indispensables.... et paient. C'est en effet grâce aux Luttes de 1974 dans les Centres de tri  ( plus d'un mois de grèves!) que les agents des PTT y travaillant ont pu bénéficier du "Service Actif " et obtenu le droit de pouvoir  déposer leur dossier retraite après 15 de service et 37,5 ans de cotisations. Ne jamais désespérer et se dire que les seules batailles perdues se sont celles que l'on ne fait pas! Alors, si vous voulez avancer, bougez, manifestez, je serais avec vous ,comme retraité maintenant !

             Mais revenons à notre COCON !

             Un espace protégé ou j'ai vécu  deux mois, le  temps de ma  cure au Centre  d'alcoologie de Montperrin à Aix en Provence. Oh, j'étais déjà sorti seul en perme , dans Aix et pour le week-end dans la famille, mais je savais qu'en rentrant j'allais retrouver cette protection contre la tentation de l'alcool.

            Mais ce 9 septembre, il me fallait quitter définitivement mon cocon.

            Ce cocon qui m'avait accueilli lorsque j'étais arrivé, en piteux état de dépendance alcoolique, avec  des idées pas très claires sur ce qui m'arrivait et sur le pourquoi et comment j'avais atterrit là.

            Un cocon ou je découvrais la Maladie alcoolique, ses ravages parmi les jeunes et les moins jeunes, les hommes et les femmes, de l'ouvrier posté au cadre dynamique, de la mère au foyer à la toute jeune fille à la dérive, des ceux qui étaient là pour la 1ère fois à ceux pour qui c'était le 2ème, 3ème re-chute et qui essayaient encore et toujours. Un espace ou je fus rapidement pris en charge par une équipe médicale dévouée, compétente et à l'écoute qui soigna mon corps mais aussi mon âme , me faisant découvrir que l'alcool n'était ni une tare , ni un vice  mais bel et bien une maladie.

             J'y ai appris la solidarité, la vraie, des confessions sans concession, les "faux alibis" et "vrai prétextes"  que l'on s'inventait pour justifier la boisson  qui s'écroulaient face à l'évidence, des souffrances physiques dues au  manque, le bonheur du jour gagné  sur la dépendance. J'ai connu la peur et le doute,  ressentis les premiers  effets d'un corps sans alcool. J'ai découvert la sophrologie, le sport pour l'équilibre, la relaxation, le respect de soi , de son corps et de  son image et de l'Autre. 

            Moi, le militant syndical habitué aux assemblées générales et autres discours improvisés, j'ai aidé dans mon Groupe de parole, les timides à s'exprimer, les anxieux à se détendre, les déprimés à se dérider, les ré-alcoolisés à ne plus avoir honte mais à se servir de leur échec comme un tremplin pour se reconstruire, comme des exemples vivants de ce qu'il fallait éviter. 

             J'ai appris au contact des autres et entendu des histoires effrayantes et effarantes sur l'alcool et ses effets pervers,  jusqu'ou il pouvait entraîner l'Être humain dans la déchéance !

            J'ai su,  et ce n'était pas le plus facile à avouer, que j'étais comme  eux.  Moi qui pensait que l'alcoolique c'était le poivrot du coin, qui  me savait "buveur excessif". j'osais enfin le dire et me le dire; "J'étais UN ALCOOLIQUE" Je savais maintenant que l'on ne pouvait pas être "un peu" alcoolique . Comme disait une copine dans le groupe:" Je peux pas dire "je suis un peu alcoolique" c'est  comme si je disais "je suis "un peu enceinte" C'est impossible !!!

             Tout cela , j'allais l'abandonner et me lancer SEUL , hors du cocon protecteur- que certains quittait la larme à l'œil  et avec regrets , et retrouver un monde ou 90% des gens sont buveurs normaux.

             Certains se sont ré-alcoolisés dès leur sortie,  ils ne se  sentaient pas prêts !

            Seul ? Pas tout à fait , car l'hôpital avait prévu de nous suivre dans des Réunions-Echange ouvertes à tous ( malades, abstinents, personnels hospitalier...) et auxquelles j'ai régulièrement assisté durant ces trois ans. 

             Premier test: mon anniversaire deux jours après ma  sortie: sans problèmes , j'étais encore sur mon petit nuage! Puis arriva les Fêtes de Fin d'année et les réveillons: les huîtres sans vin blanc, la viande et le repas à l'eau, le fromage et la bûche à l'eau pétillante pour trinquer avec les autres.... mais j'étais fier pour moi et ma famille de rentrer dans le 3ème millénaire abstinent !

            Aujourd'hui, tout me semble loin et facile, mais  que d'efforts pour résister aux "flashs" des premiers mois, combien m'ont été utiles les conseils distillés au Centre.

             Les Rencontres du mardi auxquelles j'essaie d'assister régulièrement, les Forums que je visite sur le Net, Les 4 Amis et leur forum disparu(alcooliques-abstinents- que je regrette encore, puis "alcool" et  " Vie Libre" me permettent de conjuguer la solidarité et le dialogue au virtuel comme au réel. Pour l'instant, je ne ressens pas la nécessite d'adhérer à un association, mais qui sait ?

              Dans ce cocon, j'ai appris qu'un des moyens pour se sortir de cet enfer, c'était de se fixer des objectifs, modestes et réalisables, afin de se reconstruire dans une abstinence heureuse.

                J'ai eu le plaisir d'en réussir quelques uns !

               Créer ce site, organiser avec succès une rencontre entre  les Renards "ceux qui carburent au Ricard" et  les Renaud  "qui ne boivent que de l'eau" lors d'un concert du chanteur à Marseille  et réunir ainsi deux mondes, les abstinents et les buveurs  dits normaux, à accueillir la  naissance de ma première petite fille sobre , plus quelques autres:  arrêt de la cigarette depuis 30 mois  maintenant, dentition et lunetterie refaite, etc....

             Aujourd'hui, le jeune retraité que je suis est bien sorti de son cocon. Mais il sait qu'il ne faut jamais baisser sa garde et rester  toujours vigilant face à cet ennemi mortel et sournois , à cette drogue dure qu'est l'alcool... mais aussi face à soi même !

             Et je terminerais par cette réflexion, trouvée sur le Net mais hélas anonyme;

" Vous savez , sous le sol le plus immonde, sale, boueux, cradingue, puant, grouillant de vers et de scolopendres les plus affreux et repoussant  se cache toujours une graine, une étincelle, un gemme  d'or et d'argent. La richesse de l'humanité réside dans le fait que tout être vivant' ( si même les scolopendres !!!) possède quelque chose de précieux". 

Alors,

Admettez le,

creusez, fouillez, cherchez, 

rêvez le, trouvez le, 

... et VIVEZ LE !!!

  

   Retour MAAH