Solidaire d'Ingrid Betancourt
Ouest-France
La semaine dernière, vous remettiez les pétitions pour la libération d'Ingrid
Betancourt aux côtés de son comité de soutien. Pourquoi défendre cette cause ·
- Quand on s'engage dans une action humanitaire, quand on soutient un combat,
c'est toujours pour des raisons, au départ, personnelles, affectives, qui
relèvent de notre conscience, de notre conviction profonde. J'étais interpellé
chaque fois que je voyais une action des comités pour Ingrid Betancourt, comme
je suis interpellé, jour et nuit depuis cent ans, par des milliers de causes,
des milliers de souffrances, mais je remettais toujours au lendemain. Le jour du
3e anniversaire de sa prise d'otage, je suis allé sur Internet taper «
Betancourt » dans un moteur de recherche. De là, je suis tombé sur le site d'un
de ses comités de soutien. J'ai voulu témoigner, par un message, de ma
solidarité. J'ai manifesté mon désir d'écrire une chanson pour cette cause qui
me touchait profondément depuis plus d'un an.
Et aujourd'hui, où en est ce projet ·
- La chanson, Dans la jungle, est sur le point d'être enregistrée. Un jour,
j'étais dans mon bistrot parisien, solitaire et inspiré, et les mots me sont
venus. Je l'ai ensuite offerte aux comités pour qu'ils la fassent écouter, à la
famille notamment. Etant les premiers concernés, si un mot, une virgule, ne leur
avait pas plus, je l'aurais changé immédiatement. Aujourd'hui, la chanson
existe. À travers elle, et même si je me dis parfois que c'est présumer un peu
trop de sa qualité, j'essaie d'internationaliser la lutte. Johnny Clegg l'a déjà
traduite en anglais et envisage de l'enregistrer. La version espagnole existe
déjà, je cherche un interprète.
Au-delà de cette chanson, comment souhaitez-vous concrètement vous engager ·
- Je veux me servir de la popularité que j'ai grâce à mon public pour diffuser
les messages de toutes les personnes qui se battent dans les comités. J'essaie
au maximum de leur apporter mon soutien. Je m'implique notamment dans le
développement artistique de la soirée prévue le 24 octobre, au théâtre du
Rond-Point, à Paris. Mon amour Romane Serda milite à mes côtés et profite de ses
concerts pour manifester de son soutien et le faire partager. Et puis, bien
évidemment, j'envisage de participer financièrement car il faut que mes actes
soient en harmonie avec mon discours. Je ne sais pas encore où iront précisément
les droits de ma chanson, si elle en génère (rires) mais ils serviront la cause
des otages et des enfants des rues de Bogota. Avec les comités, j'essaie de
faire en sorte que le 23 février prochain soit la date symbolique du combat pour
la liberté. Personnellement, je serais, avec d'autres artistes, en concert à
Rouen. Mais il faut que ça bouge partout, en France, en Europe, dans le Monde.
Que toutes ces actions se rejoignent et forment un ruisseau. Ça peut paraître
futile un ruisseau, mais c'est mieux qu'une goutte d'eau et une goutte d'eau,
c'est mieux que rien...
En parallèle de toutes ces actions, quel regard portez-vous sur les négociations
en cours ·
- Depuis trois ans, tout cela donne tellement lieu à des déceptions que je me
méfie des faux espoirs. Je pense que seule une mobilisation mondiale comme celle
contre l'Apartheid et pour la libération de Mandela sera efficace. Elle doit
passer, entre autre, par les artistes parce que la musique, la poésie et leur
popularité sont de véritables moteurs, des porte-drapeaux indispensables.
Source Dorothée LAURAIN OUEST-France du 9.10.05