LETTRE OUVERTE

               

La Colombie, les otages… vous vous souvenez ?

 

Et vous souvenez-vous encore des déclarations enflammées, la main sur le cœur, des politiques, des artistes, des intellectuels, qui s’engageaient à lutter pour tous les otages, bien au-delà du cas particulier d’Ingrid Betancourt ?

Tous ces beaux discours n’auront pas tenu bien longtemps après la libération de notre icône médiatique. Quelques jours, le temps de parader, de s’afficher aux côtés de la star du moment, de profiter des objectifs et des micros pour mettre en avant sa propre générosité, son altruisme, son humanisme.

Et puis, les vacances et la rentrée, la crise, le commerce qui reprend ses droits. Ah, si l’on pouvait refourguer nos vieux « Leclerc » à la Colombie qui a bien besoin de chars pour sécuriser sa frontière avec le frère ennemi vénézuelien…

A de très rares (et remerciées) exceptions près, chacun est donc retourné à ses occupations, le bal était fini, les lampions éteints. Une bonne partie des militants de base, qui avaient lancé la mobilisation et qui ont pourtant, au fil des mois, noué des relations fortes avec les familles et les proches des séquestrés, a fini par jeter l’éponge, écoeurée par la versatilité de nos « soutiens », usée par les ragots et les potins infâmants, écrasée par la chape de silence et d’indifférence qui retombait sur la Colombie.

Pourtant, grâce à la médiatisation de la séquestration d’Ingrid Betancourt, le drame colombien avec son demi-siècle de violence et de barbarie est entré, bon gré, mal gré, dans les consciences.

Qui peut prétendre aujourd’hui ignorer que dans ce pays, les syndicalistes, les journalistes, les leaders indigènes et les défenseurs des droits de l’homme sont abattus comme des chiens ?

Qui peut prétendre aujourd’hui ignorer que des civils innocents sont exécutés par les forces de l’ordre, puis déguisés en guérilleros, pour « faire du chiffre » ?

Qui peut prétendre aujourd’hui ignorer les quelque quatre millions de déplacés internes, arrachés à leurs terres, à leurs maisons, fuyant la violence et les combats pour se « réfugier » dans les bidonvilles autour des centres urbains ?

Qui peut prétendre aujourd’hui ignorer que lors des vingt dernières années, les disparus se sont comptés par dizaines de milliers ?

Qui peut prétendre aujourd’hui ignorer que l’argent de la cocaïne, sniffée par camions dans les soirées huppées du monde occidental irrigue aussi bien les blocs paramilitaires que les rangs des guérillas marxistes, ces deux mâchoires impitoyables qui écrasent le peuple colombien dans le sang et les atrocités ?

Qui peut prétendre aujourd’hui ignorer qu’il reste dans la jungle, aux mains des FARC, une poignée de pauvres hères, soldats ou policiers, souvent enfants de la misère, serviteurs d’un état colombien qui les a oubliés, abandonnés à leur triste sort, à leur humiliation, à leur déchéance ?

Ingrid Betancourt est libre depuis le 2 juillet 2008 et, quels que soient les qualités ou les défauts qui lui sont prêtés aujourd’hui, nous sommes et nous resterons fiers d’avoir participé, modestement mais avec ténacité, au combat pour sa liberté car c’était une cause juste.

Et nous sommes également fiers de continuer à nous battre pour la libération des vingt-quatre derniers prisonniers des FARC, fiers de continuer à dénoncer toutes les atteintes et violations faites aux droits de l’homme en Colombie, fiers de continuer à défendre les familles de disparus et  toutes les victimes de la violence en Colombie, car ce sont là des causes justes.

  Le 21 décembre dernier, Pablo Emilio MONCAYO et José Libio MARTINEZ ont terminé leur douzième année de détention, dans l’indifférence quasi-générale.

 Le 26 février prochain, ce même Pablo Emilio MONCAYO « fêtera » son trente-et-unième anniversaire. Lorsqu’il a été capturé au combat par les FARC, il n’avait pas dix-neuf ans…

 

 

Nous espérons sincèrement que tous les médias sauront accorder à ce triste évènement la même place et la même exposition que celles accordées à chaque livre-confidence des ex-otages, à chaque règlement de comptes, à chaque opération de communication lancée à l’encontre ou au détriment d’ Ingrid Betancourt, « idole déchue ».

Ce serait tout à leur honneur et cela rendrait justice à de vraies victimes.

 

FÉDÉRATION INTERNATIONALE DES COMITES LIBERTAD
(FICIB - Ex Comités Ingrid Betancourt )
www.ficib.eu
contact@ficib.eu

Président et porte-parole : Dominique BOUILLON 06 87 49 26 55
Contacts presse : Anne-Gaëlle LHYVER 06 19 10 23 08
Françoise GELLY 06 87 51 00 42

 

Ingrid