Accueillir l'homme dans sa singularité et dans le monde.
- La politique et les lois ne font pas le travail social. -
Renaud
Nous avons déjà lu quelques unes de ses paroles. Son passage, qu’il étire entre
Boucan d’enfer et Rouge sang, vaut vraiment la peine de passer plus de temps
avec lui. C’est vrai qu’il m’a touché, car nombre d’enfants que je reçois, lui
ressemblent : hargneux, fougueux, râleurs, toujours en peine de justice, figures
éternelles de Don Quichotte… Ils sont ainsi, comme le chante Renaud, tant qu’ils
croient en toutes les utopies, en leurs rêves de coeur d’artichaut… ils sont
ainsi, tant qu’ils n’arrêtent pas d’être “celui-là colérique” tenant en haleine
sa foule sentimentale pour que l’amour universel recouvre de tendresse la terre
et le ciel… ils sont ainsi tant qu’ils n’ont pas renoncé au monde parfait qu’ils
voudraient imposer au monde, à tous, à tous les adultes, à leurs parents qui
n’auraient pas fait ce monde assez beau…. assez bon et doux pour eux qui sont si
gentils… tant qu’ils n’ont pas éloigné la violence…celle des autres ou la leur ?
Mais, l’écriture a ceci de particulier qu’elle nous confronte à nous-même. Les
poètes chanteurs, show-biz ou pas, n’en sont pas épargnés. Alors, dans leur
bistrot préféré, c’est au travail qu’on les surprends, avec Brassens, Verlaine,
Gainsbourg, Brel. La mort en face des mots pour le dire, comme tout analysant,
ou comme tout vivant, ils se découvrent eux-mêmes : ni renard, ni renaud….
simplement Mr Séchan… nous offrant de si belles chansons sur la vie, plus si
roséabonde, sur Les cinq sens, ou sur ceux-là Nos vieux.. Une écriture, où
l’amour n’est plus si idéal, peut-être violent et déroutant, mais des écrits oh
combien plus vrais et moins idéologiques, moins apprêtés… un poète non plus
seulement redresseur de tords, mais enfin en paix avec un lui-même découvert et
peut-être accepté…. comme pas toujours si gentil, si idéal ?
Alors, la discussion peut s’entamer… au-delà des certitudes de bonté universelle
où fleuraient les colères… Par exemple Mr Renaud Séchan, dans votre dernier
album, vous hurlez contre les corridas… Rouge sang, ces torrents de souffrances
animales ou humaines… Bien sûr, rien de délectable à la mort, bien sûr pauvre
taureau… Mais, si comme vous je crois en la bonté humaine, et même j’en cherche
en moi toujours le socle, pourtant quand je vois les jeunes se battre et
quelquefois faire des morts autour d’un sport aussi pacifique que le football,
je me demande pourquoi notre société a supprimé tous les rituels à travers
lesquels les adolescents épuisaient cette pulsion violente d’agression enfouie
au tréfonds de toutes nos pulsions… Ils n’ont plus de lieux où avec des hommes,
ils pourraient se faire les dents pour trouver la paix de leur virilité…
Dr Mamytartine/ psychologue