Merci Mr Dard...
Ménestrel ou voyou ? Graine d'anar ou titi de Paname ? Ange à la figure sale ou démon au regard limpide ? Qui es-tu, Renaud, mon fils ? Tu ne veux pas le leur dire ? Tu as raison , ils ne sont pas dignes d'une telle confidence. Laisse-les perplexe à ton sujet et continue ta route comme un grand que tu es.
Renaud, mon fils, Renaud réjouis-toi : tu as pour ennemi les vieux, les vrais, ceux qui n'ont jamais été jeunes.
Ils ont peur de toi parce qu'ils sentent confusément qui tu es pourri de talent. Tu viens d'une autre planète que la leur : la planète Amour. Eux sont à jamais enlisés dans la boue pestilentielle de la planète Terre à terre. Ils t'en veulent abominablement d'oser parler une langue qu'ils ne comprendront jamais. Ils ignorent, ils ignoreront toujours ce qu'est un pote, une bibine et des santiags, ces pauvres analphacons. Ta poésie est trop évidente pour ne pas leur échapper. Ils te nient ; ce qui te fait exister un peu plus. Je leur parle de mon admiration pour toi, de ma tendresse pour toi, afin de les voir se décomposer. Je les admire dans leur écœurement car là est leur vraie nature. Alors, ils cloportent à outrance et s'étouffent dans des maudissures inaudibles. J'écoute clapoter leur voix ; l'affreux bruit rend tes chansons plus mélodieuses encore !
Renaud, mon fils, réjouis-toi : tu as pour amis tous les jeunes de la terre, les vrais, ceux qui ne deviendront jamais vieux.
Ils t'aiment avec enthousiasme parce que tu es rayonnant de talent et auréolé de tendresse infinie. Tu viens de la même planète qu'eux : la planète Fraternité. Ils te sont, et te seront toujours, éperdument reconnaissants de faire le boulot de Verlaine avec des mots de bistrot. Eux, savent ce qu'est un frangin, une mob et une gonzesse. Ton talent les aide à exister. Sous tes éclairages de fête foraine, leur banlieue devient presque jolie et leur destin moins dégueulasse. Ils se reconnaissent en toi comme dans un miroir, Renaud, mon fils. Putain, ce qu'ils sont beaux dans tes yeux !
San Antonio, 1986
Frédéric Dard disait sur R.T.L. le 22 août 1986
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San-Antonio parle de Renaud dans:
Bacchanale chez la mère Tatzi,( N° 121)
Édition Originale (1985) Édition 1997
"La cassette branchée par Thérésa est de Renaud. Un super-champion. Un infini pas con. Un incontestable. Le poète le plus poétisant de cette époque d'archimerde (sans principes). Le prince du pavé. La nostalgie arrivée à bon port. Un mord-con ! La noblesse de la timidité ! Brandisseur de glaves ! Et si frileux de l'âme, je le sens bien, que je l'emmitoufle de ma tendresse ! Renaud chante le gitan, la zone, le couteau, le clébard, les lunettes retrouvées de son taulard... Salut, le gitan, salut le manouche... Salut, Renaud. Que les saigneurs soient loin de nous ! Trouverons-nous assez de mots pour y noyer tous les merdeux ? Chauffe, mon petit mec, chauffe ! C'est pour la dignité que tu égosilles, et ils n'en savent rien.
- Vous l'aimez ? demande Thérésa.
- Davantage encore ! "