1.1 Docteur Renaud, Mister Renard
Tout le monde a sa part d'ombre et de lumière, mais certains
sont plus schizophrènes que d'autres. Dans Docteur
Renaud, Mister Renard, Renaud livre une chronique de ses
sautes d'humeur, de son lunatisme. Tout cela rappelle un
certain joueur, capable d'enchanter les foules comme de
complètement dégoupiller. Luis Suárez, bien sûr.
L'attaquant du FC Barcelone, « moitié ange » quand il
marque du milieu de terrain ou sur des reprises de volée
venues d'ailleurs, « moitié démon » lorsqu'il inflige
des morsures à Ivanović ou Chiellini. Suárez, son boulot,
c'est de « séduire les gens, les marmots, pour amuser,
pour émouvoir ». Mais malheureusement, en raison de ses
excès, il est souvent dans le collimateur des institutions
et « porte les croix sur son dos, des injustices les plus
notoires ».
1.2 Hexagone
« Être né sous l'signe de l'Hexagone / On peut pas dire
qu'ça soit bandant / Si
l'roi des cons perdait son trône / Y
aurait cinquante millions de prétendants. » Avec
Hexagone, les Français s'en prennent plein les dents.
Ils sont tour à tour qualifiés de « tocards », de « faux
culs », d'« imbéciles » et de « moutons
».
Exactement ce que pense Nicolas Anelka
de la
population du pays, qui « pleure tout le temps » et
qu'il considère « hypocrite » ou « raciste
».
L'attaquant à la quenelle n'aime pas la France, en témoigne
sa carrière passée en majorité au-delà des frontières, et ne
se prive pas pour exprimer son dédain envers sa contrée
natale et ses habitants. Dédain justement retrouvé dans Hexagone. De là à vouloir « tous les voir crever
étouffés de dinde aux marrons », il n'y a qu'un pas. Et
quant à savoir si « le fascisme c'est la gangrène »,
il devra en revanche demander à son pote Dieudo.
1.3 Je suis une bande de jeunes + Laisse béton
Yoann Gourcuff est une bande de jeunes à lui tout
seul. Isolé, solitaire, il est l'incarnation de la chanson
de Renaud, dans laquelle le personnage s'imagine une vie
dans un groupe composé de lui seul. Yoyo ne se fend pas la
gueule, mais il préfère la jouer en solo. Il a « groupé
toutes {ses} connaissances intellectuelles » dans le
monde du foot, et depuis, il fait bande à part. Et quand il
cherche la camaraderie, quand il tente une approche vers
Franck Ribéry et ses copains, il se voit toujours rétorquer
: « Arrache-toi d'là, t'es pas d'ma bande / Casse-toi tu
pues, et marche à l'ombre ! ».
1.4 La ballade nord-irlandaise
L'hymne de paix selon Renaud. Enregistrée pour l'album
Marchand de cailloux qui sort en 1991 pendant la
première guerre du Golfe, La ballade nord-irlandaise
est représentative des valeurs anti-guerre revendiquées par
le chanteur. Un militantisme partagé par le Brésilien
Socratès, qui souhaite en finir avec la dictature
militaire au pays. Si Renaud veut « planter un oranger /
Là où les arbres n'ont jamais donné / Que des grenades
dégoupillées », le milieu offensif met carrément en
place une « Démocratie corinthiane » au sein du club
des Corinthians, c'est-à-dire un système d'autogestion dans
lequel les joueurs participent directement à toutes les
décisions. L'objectif : « Lutter pour la liberté et pour
changer le pays ». Comme dans La ballade
nord-irlandaise, Socratès parviendra à « faire
pousser les fruits sucrés de la liberté » avec son
mouvement. Et deviendra lui aussi un symbole pacifique.
1.5 It is not because you are
Fait unique, Renaud choisit dans cette chanson de manier la
langue de Shakespeare... pour moquer l'anglais approximatif
des natifs de l'Hexagone, dont l'accent et les tournures de
phrase trahissent invariablement l'origine.
Jacques
Santini a vécu ce sentiment de honte
lors d'une conférence de presse absolument légendaire
pour son intronisation en tant qu'entraîneur de Tottenham. «
Aille ame véri api tou bi inne ze big cleub toténe hamme », a-t-il lâché en guise de mantra. Difficile de ne pas
imaginer ce bon vieux Jacques draguer une Anglaise à la
manière de Renaud : « And I put a spell on you / And you
roule a pelle to me ».
1.6 Manu
Des adieux et des larmes. Manu, c'est l'histoire d'un mec, en apparence dur et sans cœur, qui se fait larguer sans ménagement par sa nana. Le pauv' vieux n'en finit pas de déprimer et noie son désespoir dans les bars et l'alcool. Cette aventure, c'est celle de Sylvain Distin avec Everton. En cette année 2015, le Toffee qui partage la vie de sa dulcinée depuis six ans ne comprend pas pourquoi sonne la fin de cette idylle amoureuse. Pire, il ne sait pas comment reconquérir l'élue de son cœur. Mais au contraire de Manu, Sylvain ne déconnera pas très longtemps en pigeant qu'« une gonzesse de perdue / C'est dix copains qui r'viennent » sur la pelouse. Il retrouvera une nouvelle compagne nommée Bournemouth. À voir maintenant si « elle (aura) la migraine / Dès qu'elle (sera) dans (son) pieu ».
1.7 C'est mon dernier bal
L'histoire du dernier bal est celle d'un castagneur, un
hooligan à l'ancienne qui n'aime rien de mieux qu'une bonne
bagarre pour clôturer une soirée. En guise de « dernière
virée », quoi de mieux qu'une baston ? C'est bien ce que
doit penser Joey Barton. Parmi ses faits d'armes, un
cigare écrasé dans l'œil de Jamie Tandy, le passage à tabac
d'Ousmane Dabo, un coup de poing à Morten Pedersen, un genou
dans le dos de Sergio Agüero... Bad boy atypique,
Barton aime se dire que « Demain dans le journal / Y aura
(son) portrait ». Jusqu'à ce qu'il s'en reçoive une ?
Après tout, « dans la vie mon p'tit gars / Y a rien de
plus dangereux que de se faire tuer ».
1.8 Putain de camion
19 juin 1986. 16 heures 30. La moto de Coluche percute un
camion, achevant
précipitamment la vie du célèbre humoriste,
à seulement 41 ans. À peine quelques jours plus tard, Renaud
met sa tristesse au service de sa plume et griffonne
quelques lignes en hommage à son pote parti trop tôt. Ce qui
aboutit à Putain de camion, chanson emblématique pour
les amoureux de Coluche. Une histoire qui fait penser à
Bobby Charlton, le Mancunien des années 1960-70.
Miraculé du crash d'avion du 6 février 1958, qui est à
l'origine de 21 décès dont huit joueurs de MU, l'Anglais
devient le symbole d'une génération marquée par l'accident.
Présent à de nombreuses commémorations, Sir Bobby
s'attachera à faire respecter le devoir de mémoire par ses
mots et ses souvenirs. « Putain j'ai la rage / Contre ce
virage / Et contre ce jour-là. »