samedi 23 mai 2009 /Ouest France

Les jeunes et l'alcool : comment ils en parlent ?

Béatrice Le Grand

« Chouille », « tise », « binch' »... : le langage des jeunes sur l'alcool a besoin d'être décrypté. : Béatrice Le Grand
 

C'est devenu un problème de société. Eux, possèdent leurs rites, leurs codes. Et leur vocabulaire.  Revue de détail avec des étudiants de l'Ouest qui évoquent leurs soirées festives.

Ce soir, on se la colle ? « Quand la question est posée, raconte Maxime, étudiant en licence de mathématique, elle évacue toutes les autres possibilités. On est certain que c'est comme ça que ça va se terminer. » C'est rarement au bistro  trop cher que l'on boit. « On demande :  'Qui paye son appart'ce soir' ? » confie Gwenola, en première année d'école de commerce.

Quand le ou la volontaire s'est fait connaître, « tout le monde est content que ce ne soit pas chez lui parce que l'appartement a de bonne chance d'être ruiné ». À vingt ou trente dans un studio, « on se tasse », dit Terence, grand gaillard sportif qui étudie les mathématiques. « Comme beaucoup sont en coloc', ça fait souvent des appartements plus grands », ajoute Gwenola.

« Ce qui compte,c'est le résultat »

Une fête est une « chouille ». Forcément alcoolisée. « Tout le monde boit », raconte Ingrid, étudiante en master de droit. Les filles comme les garçons. Ne pas boire, c'est se mettre à l'écart, courir le risque « de se faire rejeter par tout le monde », dit Terence. « J'ai une ou deux amies qui ne boivent pas en soirée et elles sont considérées comme pas fun », confirme Ingrid. Certains font semblant, prétendent qu'il y a de la vodka dans leur jus d'orange.

S'il n'y a pas de « chouille », on peut décider d'aller « tiser » : se réunir chez l'un, apporter des bouteilles, boire, discuter, écouter de la musique. On dit d'ailleurs la « tise » pour l'alcool. Différence avec la chouille : quand on tise, on boit, « mais le but n'est pas de finir bourré », précise Ingrid.

On n'arrive pas à une chouille les mains vides. Qu'apporte-t-on ? Tout dépend des finances. Quand elles sont basses option la plus fréquente on achète du pas cher. « Des packs de binch' (bière, également appelée binouz'), du vin, du rosé surtout. J'ai des copains qui en ont trouvé à 67 centimes la bouteille », confie Sylvain, étudiant en podologie. Si le portefeuille le permet, on fera l'emplette de « skaï » (whisky), de vodka ou de rhum. « Toujours les premiers prix », précise Sylvain. Gwenola la Brestoise le dit crûment : « Ce qui compte, c'est le résultat ! »

Une « chouille » par semaine

On trouve quand même des jus de fruits ou des sodas dans les soirées. Mais ils ne sont là que pour accompagner un alcool. « On les appelle les «diluants» », précise Henri. Ils servent aussi à se préparer son « mélange » whisky-cola, vodka-jus de pomme dans une grande bouteille vide que chacun emporte avec soi dans la rue avant d'aller en boîte, par exemple.

Une chouille par semaine, le jeudi soir. C'est la moyenne étudiante, selon Maxime. Le but d'une soirée étant de « se mettre minable », des jeux sont organisés pour y parvenir au plus vite. Le plus connu : le « caps ». Il s'agit de dégommer la capsule posée sur la bouteille de bière de son adversaire. On se sert d'une autre capsule. « Quand on y arrive, il est 'caps' et doit boire trois gorgées, la moitié de la bière ou toute la bière, selon ce qui est convenu », détaille Terence.

Autre petit jeu, le « buffalo ». « Dans une chouille, on ne tient jamais son verre de la main droite. Quand on en voit un qui le fait, on crie 'buffalo »'te Gwenola.

Pour ne pas se faire avoir, Terence a l'habitude de toujours garder un objet dans la main droite, « un briquet par exemple ». Sinon, des jeux de cartes ou de dés permettent de s'alcooliser en s'amusant : le barbu, le vassal, le bisquit... « On boit pour être saoul », rappelle Henri. Ce qui ne va pas sans problème d'ordre physiologique. Vomir se dit « lâcher une galette ». Quand c'est fait proprement, dans les toilettes, cela n'attire aucun commentaire négatif.

Marc MAHUZIER.

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