J'ai rencontré virtuellement le Docteur F...  directeur du  Centre  D'Alcoologie d'Aix ou j'ai fait ma cure et j'ai joué, avec son accord , au Reporter Sans Alcool  .

Présentez votre établissement ,

Le service d'Alcoologie d'Aix-en-Provence a ouvert ses portes en 1964 .C'est un établissement qui pratique la thérapie de groupe  et qui a voulu rompre avec les vieilles méthodes de dégoût, d'interdiction... Le projet thérapeutique fut donc établi et nous aidons nos patients à "accéder à une vie heureuse" hors alcool.

Pourquoi rompre avec ces vieilles méthodes?

Il  se trouve  que l'on a trop longtemps culpabilisé les alcooliques, et qu'on ne considérait pas leur maladie avec les préceptes médicaux appropriés.

Est-on selon vous prédestiné à devenir alcoolique?

L'alcoolisme est fréquent dans certains environnements familiaux : il est vraisemblable qu'existe un facteur génétique. Mais cela n’est pas une fatalité : les enfants d'une famille alcoolique ne deviennent pas automatiquement alcooliques, et certains le deviennent alors qu'il n'y a pas d'alcooliques dans leur famille. Si l'on sait qu'on est exposé au risque il est plus facile de l'éviter. D'autre part commencer à boire jeune, à l'âge de 14 ans ou moins, favorise l'alcoolisme

C'est à dire qu'une minorité, 8% de la population est en potentialité de devenir malade.

                                                                                                                                                                                                                         Comment définissez-vous la maladie   

Il y a trois phases dans la maladie.                                                                                                                                                  La première est une phase de plaisir. Elle concerne pratiquement 100% de la population.                                          Durant la seconde période de "lune de miel" on trouve à l'alcool des vertus, on augmente un peu les doses... Enfin vient la phase "dépendance alcoolique", "la lune de fiel", on a perdu le plaisir, et l'on rentre dans la souffrance.

Les personnes qui atteignent la troisième phase, et qui se retrouvent dans notre centre sont souvent des  "malades alcooliques" car physiologiquement, quand elles atteignent cette phase elles développent une substance comme de la morphine à partir de leur prise d'alcool. C'est leur corps qui décide. Et c'est pour ça que pour se sortir de leur dépendance elles ne devront plus jamais toucher à une goutte d'alcool, sinon le mécanisme physiologique est ré-enclenché et la dépendance revient, indépendamment de leur volonté.

L'alcoolisme n'est donc pas une maladie de la volonté?

Non, absolument pas, c'est un mythe à casser auprès du grand public, car ce mythe à fait du mal à des générations entières d'alcooliques qui se voyaient pointés du doigt par leur entourage proche : "Tu es alcoolique, et alors tu n'a qu'à t'arrêter de boire..." Or ces personnes doivent être traitées, et la dépendance est bien justement un problème indépendant de la volonté des alcooliques.

Mais attention, parmi les 92% restants, il y a des buveurs excessifs, qui mourront de cirrhoses, de cancers du foie, de pancréatites...  

Les "malades alcooliques" sont eux des toxicomanes à l'alcool. Le malade alcoolique est un malade de l'émotion, un malade de la communication, et il faut remonter souvent loin dans l'enfance pour comprendre les causes réelles et parfois indicibles qui ont poussé à boire.

Peut-on guérir?

Tout le débat est là. Les malades disent souvent ne pas être guéris, puisque s'ils retouchent à l'alcool ils replongent. En fait, ces gens sont traités. Les statistiques montrent que 60% des personnes arrivent à retrouver une vie normale, c'est à dire qu'ils trouvent dans l'abstinence des bénéfices supérieurs à ceux qu'ils trouvaient dans l'alcool. 

.Pour qu'un alcoolique mette un point final à son habitude, on doit l'aider à comprendre les raisons sociales et personnelles qui l'ont poussé à boire, en tout en premier lieu.
Il doit également apprendre à supporter, sans boisson, le stress de la vie quotidienne.
C'est là que les semaines de psychothérapie de groupe, de relaxation, d'hypnose... sont importantes  ajoutés au  traitement médicamenteux  en période de sevrage

C'est difficile pour quelqu'un de trente ans de comprendre et d'accepter que durant le reste de sa vie il ne pourra plus toucher une goutte. Souvent la rechute est nécessaire d'ailleurs car la première fois que l'on vient en cure on n'est pas toujours prêt à comprendre les raisons qui ont fait que l'on est devenu malade alcoolique. Donc, dans de nombreux cas la rechute, voire les rechutes sont nécessaires.

Retour MAAH