Le CR du concert de La Courneuve ?

 

Simple comme un coup de fil

 

 

 

Allô, Georges ?

Salut, c’est Greenpuce.

Comme je sais que tu adores Renaud mais que du haut de tes 88 balais, avec tes vieilles guiboles usées par les manifs, tu n’as pas pu aller le voir à la Fête de l’Huma, ben, je vais te raconter ce 3ème dimanche de septembre…

Et tu vas voir, c’était pas un dimanche à la con !

Et oui, si le 23 aout, le Secours Populaire a emmené des gamins passer la journée à la mer, moi, le 17 septembre, on m’a emmenée passer la journée à La Courneuve.

Mais 2h20 de trajet, c’était pas rien et j’arrêtais pas de demander « A quelle heure on arrive ? »

D’ailleurs, à peine arrivée à la Porte d’Orléans, j’avais déjà le blues.

Mais dans le RER, coup de bol : on croise Lucien et sa bande. Ils allaient au concert de Renaud, eux aussi. Ah, ceux-là, dans l’temps, c’était la bande de jeunes de la cité, aussi célèbre que celle de la chanson.

Maintenant, ils sont presque tous à la retraite.

Ben ouais, si notre idole a vieilli, ben, ses fans aussi, forcément !

Quant à moi, avec mes douleurs partout, j’ai l’impression que j’ai cent ans…    Si, si, sans déc’ !

En descendant du RER, en pleine banlieue rouge, on a eu la chance de choper le 133 juste avant qu’il ne démarre. Sans ce bus miraculeux, c’était « randonnée pédestre » pour tout le monde.

Hey, Georges, tu vas pas m’croire : devine qui y’avait dans le fond du bus…

Rita, Slimane et Jonathan en pleine discussion sur les dangers de la mondialisation.

J’te jure … C’est pas du pipeau !

Enfin, le bus nous a déposé tout près du parc où se déroulait la Fête.

« Trop cool », comme disent les mômes !

Ah, la Fête de l’Huma… Rassemblement mythique dont la première édition remonte à 1930.

Toi, le vieux militant, tu m’as souvent raconté tes « Fêtes », mais depuis, ça a beaucoup évolué.

Cette année, il parait qu’il y avait 450 stands, dispersés sur 50 hectares, avec plus de 550 000 visiteurs. Tu te rends compte ? C’est énorme !

De notre côté, les barrières de sécurité à peines franchies, après l’inévitable fouille des sacs (Plan Vigipirate oblige), on s’est sentis joyeux comme des gosses.

Petit tour sous la halle Léo Ferré qui recelait des tas de trésors : des vieux bouquins devenus introuvables et aussi des 33 tours de notre adolescence dont Brassens, Renaud, Ferrat. On a bien failli acheter tout le stock !

Pour la pause casse-croûte, c’est à grand regret que nous avons délaissé les alléchants menus gastronomiques proposés par les exposants du sud-ouest pour nous installer, peinards, dans un petit stand tout simple, mais très chaleureux qui nous a offert un repas sans prétention, dans une ambiance   « bal musette » super sympa. T’aurais été là, ça t’aurait rappelé ta jeunesse !

Dans cette atmosphère aussi joyeuse que militante, moi, j’imaginais déjà Oscar, accoudé au comptoir, déplorant les réformes engagées par le gouvernement Macron, face à la mère à Titi, complètement désabusée.

Bon, après s’être bien calé l’estomac, on a repris notre balade, au hasard des allées de cet immense parc, mais sous un ciel de plus en plus menaçant.

Tiens, sur notre gauche, c’est le stand de Greenpeace, juste à côté de celui de Médecins Sans Frontières. Au coin de l’allée, la « Guiguette d’Ivry » organise des débats tandis que la lavande exposée sur le stand du Vaucluse fait de la concurrence aux espadrilles vendues sur celui du Pays Basque. Un peu plus loin, l’espace FSGT propose des initiations sportives aux jeunes, amateurs de sensations fortes.   Quelle diversité, cette Fête !

Mais ce qui menaçait est arrivé : je sens des gouttes…

Mince, il pleut ! Alors là, à 2h du concert, on est vraiment mal barrés ! !

Sauve-qui-peut général : les femmes, les enfants et les fans de Renaud d’abord ! Tout le monde court dans tous les sens à la recherche d’un abri de fortune.

A partir de cet instant, le stand de « La Courneuve-Le Bourget », qui nous a offert l’hospitalité sous ses bâches protectrices, est devenu mon bistrot préféré jusqu’au début du concert.

Mais même assise bien au sec, j’ai trouvé ces 2 heures interminables…

La pluie faisait un sacré raffut, en tombant sur les grosses toiles cirées. Je dirais même qu’elle faisait un boucan d’enfer. On n’entendait même plus les interventions au micro du traditionnel meeting, se tenant sur la Grande Scène.

17h35 : Enfin, les politiques se retirent et le concert, « notre » concert, celui qui va clore la Fête de l’Huma, va commencer.

C’est avec quelques minutes d’avance que les premières notes retentissent et que les projecteurs s’allument.

Tous les musiciens sont déjà là tandis que derrière la scène, en vidéo, un long tunnel s’éclaire au bout duquel la silhouette de Renaud apparait.

Aussitôt, le public envahit la pelouse, devenue un gigantesque bourbier.

Mais incroyable hasard, la pluie a cessé juste avant qu’il ne commence à chanter.

Et là, Georges, t’imagines ? Ça y est, l’idole est là, juste devant nous. C’est con, mais on est aussi émus qu’au tout premier concert de la Tournée, il y a presque un an.

Sur scène, Renaud, bandana rouge autour du cou, est vêtu d’un pantalon de cuir noir, du t-shirt de soutien à Yvan Colonna et d’une veste noire.

Il entame le concert par « Toujours Debout ».  

Deux heures plus tard, il le terminera par « Fatigué ».

D’emblée, il rappelle au public que « sa voix est un peu pourrie… rocailleuse, caverneuse… mais généreuse … car il donne tout ce qu’il a ».

En fond de scène, les projections vidéo offrent toujours un bel écrin à la plupart des chansons. J’ai beaucoup aimé ces décors, imaginés pour le Phénix Tour et je suis heureuse de les retrouver jusqu’ ici, pour ce concert en plein air.

Le plus souvent, Renaud se tient debout, juste au bord de la scène.

Ses deux pépites bleues d’azur contrastent comme des étincelles dans le ciel gris et sombre de ce dimanche pluvieux. Mais tu vois, Georges, lui aussi doit avoir les guiboles fatiguées car de temps en temps, il va s’assoir pour chanter. L’équipe des musicos est là, au grand complet, pour sublimer ses textes… qui par un trait de flute irlandaise… qui par une phrase musicale délicatement reprise à la guitare. 

Comme à chaque fois, Renaud ponctue son récital de quelques commentaires teintés d’humour et d’autodérision. Et on ne s’en lasse pas !

Après environ 1h30 de concert avec, entre autres (et dans le désordre) Les Mots, J’ai Embrassé Un Flic, Manu, Manhattan Kaboul, Laisse Béton, Germaine, Morgane De Toi, En Cloque, Marchand De Cailloux, C’est Mon Dernier Bal, Morts Les Enfants, La Ballade Nord Irlandaise, Dès Que Le Vent Soufflera, et plein d’autres encore, toute la troupe se rassemble sur le bord de la scène pour le salut final.

C’était déjà fini ?

Mais non, Georges, tu sais bien : A chaque concert, Renaud nous fait le coup du faux départ, mais c’est une blague et les chansons reprennent de plus belle juste après.

Et donc, c’est là qu’il nous a annoncé son désormais traditionnel pot-pourri qu’il décrit comme étant « complètement pourri » ce qui fait marrer tout le monde.

Moment génial où les vieux fans comme nous se régalent en retrouvant les titres qui ont bercé, et parfois secoué, leur jeunesse de la fin des années 70.

Ambiance « Petit bal du samedi soir », sauf qu’on est dimanche après-midi !

Dans la foule, l’émotion monte d’un cran et on chante tous ensemble sur les extraits d’Hexagone, Chanson Pour Pierrot, Marche A l’Ombre, It Is Not Because You Are, Ma Gonzesse, La Mère A Titi et toutes celles que j’oublie.

Certes, la pelouse devant la Grande Scène n’était pas noire de monde, comme pour la dernière venue de Renaud en 2007, mais la météo catastrophique avait de quoi en décourager plus d’un.

Dans les tout premiers rangs, les fans absolus étaient bien là, chantant, dansant, tapant des mains, en osmose totale avec Renaud.

Mais le reste des spectateurs, toutes générations confondues, semblait un peu moins accro au répertoire renaudien, plus discret, moins enthousiaste que dans les concerts en salle.

Faut dire que les 10 cm de boue qui recouvraient toute la pelouse freinaient aussi les élans.

Les plus prévoyants avaient troqué les santiags contre des grandes bottes en caoutchouc. Mais pour la majorité d’entre nous, on pataugeait lamentablement dans la boue dès qu’on faisait 3 pas, on dérapait et certains se sont retrouvés les fesses dans une flaque sans avoir pu éviter la glissade fatale.

T’aurais vu cette séance géante de patinage artistique improvisé, Georges… C’était burlesque … Il devait bien rigoler, Renaud, du haut de la scène !

Mais anecdotes météorologiques mises à part, pendant au moins deux heures, nous avons retrouvé des tas de chansons qui ont jalonné sa carrière ainsi que nos vies, des toutes récentes comme des très anciennes. Que du super !

Puis, après les dernières notes de « Fatigué », grâce aux projections vidéo, notre poète s’est métamorphosé en phénix. Instant magique lorsque ce dernier a déployé ses ailes, pour partir doucement survoler la foule massée devant la Grande Scène, avant de disparaitre à l’horizon.

Après un tel final, tout le monde est resté scotché plusieurs secondes avant de prendre conscience que le Phénix Tour venait de se terminer.

Tu te rends compte, Georges, il parait que c’était la 120ème date du Phénix Tour… 

J’ai beau rembobiner mes souvenirs, depuis la première à Evry, le 1er octobre dernier, en passant par tous « mes » concerts de 2016/2017, j’ai du mal à réaliser que ce soir, le rideau est bel et bien tombé sur cette magnifique Tournée.

Tiens, si tu avais Renaud au téléphone, là, ce matin, au lendemain du concert de la Fête de l’Huma, tu lui dirais quoi, toi ?

Moi, je crois que je le féliciterais d’avoir organisé ce marathon musical d’un an et surtout je lui adresserais un énorme MERCI d’être remonté sur scène pour, une fois de plus, offrir plein de bonheur à ses vieux fans.

 

Allez, Georges, je raccroche, pour te laisser le temps d’aller acheter ton journal… Dis, si dans l’Huma, tu trouves un article sur la journée d’hier, tu pourras me le garder ?

J’aimerais bien avoir un CR du concert de Renaud !

 

 

PS: Quelques jours plus tard, Greenpuce a reçu un coup de fil de Georges lui annonçant que l'article de l'Huma venait de lui être posté, qu'en attendant il lui transmettait le SCANN et même la petite surprise qu'il avait découverte chez son libraire: la version Magazine du CR !

 

 

Le Cr Du Concert De La Courneuve Greenpuce

 

Renaud