Premier passage de Renaud à Pau pour son Phénix tour, mardi
soir.(22.11.2016)
La voix a morflé mais le public s’en fiche
Quel
chanteur pourrait risquer de se présenter devant le public avec une voix
si écorchée, si estropiée? Johnny ? Aznavour ? Sardou peut-être. Guère
plus.
Cette question, le public du zénith de
Pau se l'est surement posée mardi soir à l'entame du concert de Renaud.
Ce "Phénix tour", tout en autodérision, a le mérite de replonger les
spectateurs dans leurs souvenirs mais les expose aussi à une cruelle
mise à jour. Si on fermait les yeux, si ce n'était pas
Renaud lui-même, on crierait naturellement à l'odieuse
reprise.
Le tour de chant commence par le tube "Toujours vivant".
Rien n'est dissimulé, le roi de la pop française est nu, à poil.
Le public est immédiatement confronté à ces râles qui
accompagnent toutes les voyelles un peu poussées. La voix est encore sèche et le
timbre s'adoucira à mesure que le généreux concert avancera.
Incroyable communion
Toujours vivant, toujours debout ? "Retapé, requinqué,
il faut le dire vite", concède Renaud dès la fin de cette première chanson. Il
invoque un rhume doublé d'une bronchite mais on reconnaît le grondement des
premiers extraits entendus il y a quelque mois. "Vous vous en foutez, vous
n'êtes pas venu pour ma voix ? Vous n'êtes pas là pour écouter Pavarotti ou
Céline Dion ?". Tonnerre de "Non".
Le public est venu retrouver "son" Renaud et
l'incroyable communion du phénix avec la salle fait de ce concert un beau
moment. Les belles balades du dernier album ou les classiques "Manu", "Pierrot"
ou "Mistral gagnant" souffrent forcément des éclats. Mais quand le verbe chahuté
s'estompe derrière les orchestrations solides et le chœur des 5000 spectateurs
du zénith, on se croirait revenu à la tournée Paris-Province de 1995.
On redécouvre même l'incontournable "Dès que le
vent soufflera". Avec la voix du vieux loup de mer ressorti du fond de cale, le
"tintintin" est plus tonitruant que jamais. Comme dans les romans dont vous êtes
le héros, le public reprend tout en chœur. Il supplée Axelle Red sur "Manhattan
Kaboul", il fait les refrains de "Marche à l'ombre", "Morgane de toi", "Dans mon
HLM"... " La Ballade nord-irlandaise" résonne comme au Hameau. La salle savoure
ses retrouvailles.
Elle ne manque pas le rappel de son amour de
jeunesse dans un rare tintamarre. Renaud revient avec un pot-pourri repris à
l'unisson et reprend ce fameux "Hexagone" que les fans gueulards de la première
heure exigeaient depuis le début du concert. Comme d'hab.
Renaud à mi-chemin entre Daniel GuiLe sentiment
global est positif, le concert fait chaud au cœur et on s'est presque habitué à
ce nouveau chard et le pilier du bar des amis. Le dernier mot ira à notre
voisine de gradin : "Le temps est assassin et emporte avec lui la voix de nos
chanteurs. Mais on s'en fout, on passe un bon moment."