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Voici donc ce coup de gueule de  Klaire fait Grrr, suivit des crédits. Les paroles peuvent être lues en cliquant ici !

  Création, texte, voix et réalisation : Klaire fait Grr
Voix supplémentaires : Guillaume Meurice (le vieux con) et Sabine Zovighian (la mère de
Klaire)
Réalisation et mixage : Charlie Marcelet

Illustration : Pauline Aubry
Production : ARTE Radio

Chansons de Renaud : Morgane de toi, Marchand de cailloux, Hexagone, Société, tu m’auras pas !, Le petit chat est mort, Fatigué, La médaille, Chanson pour Pierrot, Il pleut, Où c’est qu’j’ai mis mon flingue ?, C’est quand qu’on va où ?, J’ai raté Télé-foot, Tu vas au bal ? et… Corona Song.
Chansons d’autres artistes :
 Mon vieux (Daniel Guichard), Pour que tu m’aimes encore (Céline Dion), Quand on a que l’amour (Jacques Brel), Avec le temps (Léo Férré), Dis, quand reviendras-tu ? (Barbara), Symphonie nᵒ 40 en sol mineur (Mozart), My heart will go on (Céline Dion) et L’hymne des femmes.

 

 Copie du texte d'après le podcast:   SVPat        
 Les ajouts de
SVPat sont en Jaune
 Les chansons de Renaud , vous les reconnaîtrez, j'en suis sûr !


Tu fais chier hein !

C’est pas l’homme qui prend la mer, c’est ceux qui l’aime qui prennent cher.

Tintintin mon cul !

Tu fais chier !

Moi je passe ma vie à t’avoir dans ma tête et dans mon cœur. Je t’aime envers et contre tous. Je brandis mes p’tits poings rageurs tout plein de ta colère pour que tu me passes au final, le cœur au sanibroyeur.

T’étais mon héros malgré que bon, t’es devenu le mec gênant du réveillon. T’es vraiment un cas !

(un glas sonne)

Y’en a qui perdent leurs parents, pour un crabe ou un accident. Y’en a qui en chient, y’en a qui en pleurent, dans un torrent d’Alzheimer, qui en prennent pour 10 ans de psy, et moi je suis là avec mes conneries. Tu crois que j’peux débarquer chez le docteur, et dire : «  Ca va pas fort. Renaud est mort !  Enfin juste à mes yeux, pas vraiment mort.»

J’ai un cercueil mais j’ai pas de corps, je te déteste.

Peut-être qu’être adulte, c’est brûler ses idoles, mais t’étais pas obligé de fournir les allumettes et d’avaler un shot de pétrole

Il faut tuer le père, mais  mon père c’est  pas toi,. J’ai un poignard qui s’enfonce dans du rien, dans du gras.

J’ai un Œdipe qui serait passé chez Affelou au lieu de se crever les yeux, c’est nul et je vais te dire pourquoi mon vieux. ,

Mon vieux (Daniel Guichard) Oui, c’est Daniel Guichard, rien à voir…

J’ai 10 ans, presque ¾ dans une banlieue même pas dortoir

(Musique J’ai 10 ans- Souchon )

Ah, nan, nan, j’ai pas la télé, je suis trop petite et puis j’ai des parents instit, j’ai des couettes évidemment, mais faut pas croire pour autant j’aime déjà pas les gens. ‘ y’a des coupes de cheveux tu sais qui disent pas la vérité). J’ai un manteau que je déteste à mort, sauf  à part qu’il a des grandes poches d’accord. J’ai vachement de bonnes notes et puis vachement pas beaucoup d’amis. Faut dire que je suis allergique à tout Elle est  allergique à tout et j’éternue tout le temps, partout. « Bouuuuuh ! Salade de morve ! Bouillie d’andouille »

J’ai 10 ans ¾ et c’est clair c’est pas la meilleure panoplie pour devenir populaire, mais je suis pas Causette pour autant, c’est juste que j’renifle tout le temps.

Attends, coupe pas la radio, tu vas voir, t’arrives Bientôt !

 Musique « Joyeux anniversaire »

Eh, c’est éteint là

 … Joyeux anniversaire »

Le jour de gloire est arrivé : j’ai enfin un lecteur de CD. Je plonge tête baissée, sans complexe, dans la chanson française à textes. « Dans l’effroi, dans l’effort, je te jette un soooooort… pour que tu m’aimes encore » (Céline Dion). Hein, mon premier CD, attend c’est pas toi, t’es marrant, on est en 96 tu vois, à 11 ans, on te file pas ça. La gamine de 11ans se charge toute seule d’aller fouiller où les parents rangent leurs CD.

« Quand on a que l’amour… » (Brel)    «  CHIANT… ! »

« Avec le temps…. » (Ferré)     «  CHIANT… ! »

«  Voilà combien de jour… » (Barbara)  « SUPER chiant… !«  CHIANT !!!   SUPER chiant… ! »

«  Ils commémorent au mois de juin 

Un débarquement de Normandie… »

Ils pensent au brave soldat ricain

Qu’est venu se faire tuer loin de chez lui… »

J’EMPRUNTE UN TRUC …

Je comprends que dalle aux références, mais je devine que j’suis d’accord.

« …Ils oublient qu’à l’abri des bombes

Les Français criaient : Vive Pétain ! 

Qu’ils étaient bien planqués à Londres

Qui avait pas beaucoup d’ Jean Moulin  »

Bah, je sais pas…Les gentils s’est des gens moulins, les autres c’est des gens méchants mais j’suis pas sûre. Ouais, enfin, bon, rappelle-toi qu’à l’époque Internet c’était ça : «  L’encyclopédie  mutimédia dont vous avez toujours rêvé pour vos enfants, des  cassettes vidéos passionnantes et même un CD-ROM pour travailler plus facilement, 29 francs seulement ! » (Pub) . Donc je galère, mais camembert ! Je devine que la colère ça va me parler et que je me sens du côté des enragés

Dans ma chambre, j’ai un fauteuil. alors j’y écoute ton CD parfois, mais je me prépare à bondir parce que je sais ce que tu vas dire ;

«  Mais en attendant je chante, et je te crache à la gueule.

 Cette petite chanson méchante que t’écoutes dans ton fauteuil »

Je me lève de mon fauteuil usé pour pas que ça me soit destiné, comme si ça suffisait à me protéger, je veux pas en faire partie, je veux pas attraper la bourgeoisie.

L’équipe de France est Championne du Monde en battant le Brésil 3/0...

J’ai 13 ans…

Je suis déjà pas jolie, je suis toujours pas populaire mais je commence à comprendre que mon truc à moi c’est un peu d’humour, beaucoup la colère  et  puis souvent les deux parce qu’on attrape pas les mouches avec du gruyère. Ouais, je sais, mais ça rimait. J’aime pas les trucs grandiloquent, je trouve que les textes qui tabassent vraiment, c’est ceux qui pètent pas plus haut que leur cul. Nan mais, t’ as vu, y’a des comptines pour enfants plus balèzes que Victor Hugo, mais pour être honnête j’ai  surtout vachement pas lu  Victor Hugo. J’écoute que Brassens et toi en gros et vos chansonnettes qui peuvent devenir  des brûlots. J’aime qu’il défonce la peine de mort à coup de gorille en Liberté et que tu te serves d’un petit chat tout mort  pour aller bouffer du curé.

«  Le petit chat est mort et toi et moi, on va couci-couça.

A cause de quoi ? A cause qu’on s’demande bien pourquoi

T’as jamais un papa sur les toits

Etre trop près du ciel, p’être qu’y’z’aiment. »

 

 J’ai 14 ans et demi…

Je déteste la guerre et puis je déteste la mort aussi. Je passe donc à ça d’une carrière de Miss France, oui mais j’t’ai dit, j’suis pas jolie. J’ai de la colère plein les poches de manteau moche et j’décide d’arrêter de manger du moineau  et puis des autres animaux. Quand je serais grande et lycéenne hé bah, je serais végétarienne ! On va se foutre de ma gueule sûrement mais j’ai l’habitude attend et puis je m’en fous parce que je sais que sur n’importe quel bout de terre, face à n’importe quel gros con, c’est ceux qui sont en colère qu’ont raison.

« Fatigué de parler, fatigué de me taire.

Quand on blesse un enfant, quand on viole sa mère

Quand la moitié du monde en assassine un tiers

Fatigué, fatigué.. »

 

J’ai 20 ans et j’aime pas ça…

Faut dire que j’aime pas grand-chose, c’est pas pratique pis le reste je suis allergique. J’ai  mis ma colère dans l’envie de jouer Phèdre et Andromaque pieds nus sur les planches qui craquent, le cœur à vif, la place à demi tarif.

Quand je serais grande et parisienne eh ben je serais tragédienne ! Mais dans la vraie vie, j’ai passé un casting Nesquik avec une queue de lapin en plastique.

« Songe aux cris des mourants dans la flamme étouffés sous le fer expirants » (Racine-Andromaque)

« Ahhhhhh !!! Les céréales Nesquik qui rendent le lait si chocolaté »

Je vois ma colère s’émousser et se diluer dans le lait chaud, c’est peut être comme ça qu’on attrape la bourgeoisie à force de devoir tout diluer dans du chocolat pourri.

« Société, société…tu m’auras pas. »

 

J’deviens adulte à moitié, je deviens cette fille un peu ratée, un peu à côté de la plaque. J’pourrais sombrer, j’pourrais couler mais il y’a des mots, souvent y’a tes mots qui me rattrapent par le colback, qui me disent : ‘’Attends, c’est pas toi qu’est bizarre, c’est juste le monde qui a une gueule de cauchemar’’

« Maréchaux assassins, l’amour ne vous dit rien

A part bien sûr, celui de la Patrie, hélas !

Cette idée dégueulasse qu’à mon tour je conchie ! »  

Alors parfois, comme t’as pu le faire, je noie mes peurs dans le Picon-bière. Ca peut pas être un problème, un truc aussi jolie qu’un Picon-bière !

«  Le jour où tu t’ramènes, j’arrête de boire promis.

au moins toute une semaine, ça sera dur mais tant pis. »

 

J’ai pas encore 30 ans…

Je m’attache à une gamine pas à moi à qui je file un bout de mon cœur, comme ça, comme on file un bout de son pain au chocolat, un bout qu’on reverra plus parce que, bah salut, ton père m’aime plus.

«  Tu peux pas t’casser il pleut, ça va tout mouiller tes cheveux

Et puis d’abord ça suffit, on s’casse pas à 6 ans et demi… »

Et cette année-là, y’a mon monde qui s’écroule dans un boucan d’enfer. Y’a ma valise chez ma mère, y’a des balles qui volent dans Paris, y’a des balles

qui volent dans Charlie et toi, sans déc’, dans tout ce boxon, tu trouves pas plus con que de dire en interview que tu vas voter Fillon.

« Renaud c’est mort, il est récupéré… »

Pour cette fois, pour une fois, je ferme les yeux parce que je mets ça sur le compte d’une provocation gratis, je mets ça sur le compte d’une tournée de pastis. Eh, c’est pratique de pouvoir mettre des trucs sur le compte des autres. Dis c’est sympathique  quand la maison fait crédit.

Moi là-dedans, je suis devenu Écriveuse de trucs grognons et c’est un peu ta faute, t’façon…

« Quand  j‘s’rais grande, j’ veux être heureuse, savoir dessiner  un peu Savoir me servir d’une perceuse, savoir allumer un feu… »

T’as pas toujours les poings serrés, même que souvent t’fais marrer quand tu racontes les mobylettes, l’amour et les coquillettes et puis des gens qui n’existent pas, mais vachement ressemblant des fois.

« Jouer peut être du violoncelle, avoir une belle écriture pour écrire des mots rebelles à faire tomber tous les murs… »

J’te dois de m’avoir appris à voir dans les gros mots  de la poésie, puis dans les petits mots aussi.

En fait, j’aime pas grand-chose dans la vie alors bah, je sais pas….merci ?

« Nous qui sommes sans passé, les femmes… » (Hymne des femmes-MLF)

Puis voilà, là ça fait 20 ans que j’ai 14 ans et demi au moins…

Mes colères ont rencontrés d’autres mots que les tiens

«  Nous n’avons pas d’histoire…. » (Hymne des femmes -MLF) 

Des mots de femmes, les poings battants, des mots puissants

«  Levons-nous  femmes esclaves et brisons nos entraves… » (Hymne des femmes -MLF)

J’ai peur si je venais à t’écouter d’être obligée de te détester

« Debout…debout…debout… » (Hymne des femmes -MLF)

T’étais un peu anar-gaucho,  t’étais à tendance écolo, même que c’était pas encore la mode et même que La mode ça pue et c’est moche et c’est plus pratique d’avoir des grandes poches.

Mais j’ai peur que ce type-là n’existe plus, qu’il ait disparu après ses trois tours de piste. J’ai peur que t’aies fait le coup du Parti Socialiste. J’ai peur que, comme beaucoup de types de ta génération, tu sois devenu un vieux con, un de ceux qui réduisent le #metoo de mes sœurs

« Oh la la la laaaaaa …»

….au théorème de l’ascenseur

«  On va plus pouvoir prendre l’ascenseur avec une femme avec tout ça… »

Alors comme j’ai peur, pour  pas prendre de risque, je t’oublie, je te dénie, je te range dans un carton de la cave où je vais pas.

Et puis le temps passe, sauf  que, coup de grâce, je te vois partout, d’un coup. Tu balances un slip merdique avec masque sous le nez comme tous les connards trop fiers de sortir sans slibard avec au fond une gonzesse, un peu sexy, qui sert à rien, potiche, merci.

T’as passé ta vie à affûter ta guitare contre ces blaireaux, ces crevards qui nous refourguent la haine de nos prochains, qui nous refourguent les poings dans nos projets et là tu nous fais quoi ? Le coup des Chinois ? Mais ça va pas ? Qui mangent du chien ? T’as honte de rien ?

« T’as débarqué un jour de Chine, retournes-y qu’on t’y confine

Dans ce pays où l’on mange du chien…. »

Puis de tout ça, de tous ceux là-bas qui nous ont zigouillés l’hôpital qui crève, de ceux qui ont brisés nos grèves que tu aurais pu fracasser, de celles qui continuent de bosser, des précaires, des qui galèrent, des qui peuvent plus faire la manche et la révolution, qui peuvent plus bosser comme putains dans leur camion. T’avais que ça à leur offrir comme chanson ?

Et les BFM de mon cul qui se gavent de nos peurs et sont jamais repus ? Quoi, ça t’énerves plus ? Ça t’énervais, attends, quand j’étais petite, pourtant !

« L’information pour ces mecs là c’est d’effrayer l’prolo, l’bourgeois

A coup de chars russes, d’Ayatollah.

Demain faites gaffe, y va faire froid… 

A part ça, eh ben ça va, s’il se passe quelque chose, on vous le dira…»

Et fais pas le coup de l’âge et du naufrage, 60 balais c’est une excuse pour être pété d’arthrose, pas finir vieux con.

Moi j’ai des beaux-parents faut leur faire des mises à jour Windows mais ils ont toujours le goût de la révolution.

Je suis fâchée parce que j’aurai voulu  encore t’aimer, mais là c’est trop tard, c’est cramé.

Y’a mon minuit qui vient de sonner, j’suis là avec une pauvre pantoufle de vair,  de dernier verre.

Il me reste tes vieilles chansons en bandoulière et je me retrouve comme  une Cendrillon à la con, le rimmel jusqu’au menton !

Tu me laisses en plan sur le trottoir.

Bon bah voilà, j’t’ai dit au revoir.

J’aurai bien agité mon petit mouchoir pour une fin triste et poétique, mais moi j’peux pas. Point ….Je suis allergique con !

« Bon ça suffat comme ci, faisez-en des chansons vous… »

 

 

  Renaud