D'ordinaire discret, le frère jumeau de Renaud signe un livre de photographies sur sa dernière tournée. L’occasion de rappeler l’immense attachement du public au chanteur. Et de balayer quelques polémiques... |
Renaud sur scène, beaucoup. En coulisses, un peu.
Avec ses musiciens, surtout. Et le public, toujours.
Dans le livre Renaud, tournée générale!,
son frère jumeau, David Séchan, revient en image sur
le Phénix Tour, son phénoménal retour.
D'un naturel plutôt discret, cet ancien photographe
documentaliste, aujourd'hui éditeur musical et
administrateur de la Sacem, a ressorti l'objectif
pour immortaliser la (nouvelle) résurrection de son
illustre frangin. Au détour d'un texte bien senti,
il en profite aussi pour solder quelques ardoises.
Pourquoi sortir ce livre?
Renaud est tombé au fond du trou, on le pensait très éloigné
de la scène. Son retour nous a tellement rendus heureux que
j'ai voulu en témoigner.
C'est pour ça que j'ai pris l’appareil. En studio d'abord.
Renaud refusant toutes les rencontres avec des photographes,
j'ai été le seul à pouvoir le shooter.
Ensuite, après le succès de la tournée, l'idée m'est venue
de continuer. Il a râlé mais je crois qu’il est satisfait!
Il signe même la préface…
Oui! Parfaite d'ailleurs. Je ne lui ai pas trop parlé du
projet, je savais qu'il m'aurait dit non. Il a tellement été
traqué qu'il se méfie.
"Cette mélancolie reflète le fond de son âme, je pense"
L'essentiel des prises de vue est sur scène. On
imagine, malgré vos liens, la nécessité de se faire tout
petit...
Exactement. Les photos de coulisses sont un peu volées,
c'est pour ça qu'il y en a peu. Il y a en a une que j'adore,
où il dort, au Zénith de Saint-Etienne…
Quelques photos dans le bus aussi. Je ne voulais pas violer
son intimité, mais sur scène, il ne pouvait rien dire.
Ce que vous saisissez, malgré les salles pleines,
c’est surtout sa mélancolie. Non?
C'est vrai. On a toujours l'impression que Renaud est
ailleurs. Il est devant 9000 personnes qui chantent ses
chansons et il semble absent.
Cette mélancolie reflète le fond de son âme, je pense. C'est
ce qui me touche le plus.
Vous n'avez pas cherché à le transformer?
Il y a eu quelques retouches mais pas pour en faire
un jeune premier! Je voulais le montrer tel qu'il
est: incroyable.
Dans les loges, je me dis à chaque fois, comment
va-t-il assurer deux heures et demi de spectacle et,
dès qu'il monte sur scène, il gagne vingt ans.
C’est le talent, ou l’instinct, je ne sais pas. Et
ce n'est pas feint, car il ne joue pas, il est brut
de pomme!
Vous balancez sur la scène actuelle, Maître Gims
et Jul en tête, et les Victoires de la musique, ce "naufrage
avéré de la chanson française"…
Non… Bon, c’est un peu polémique, il en fallait bien! On a
gardé ça car, c'est vrai, cette cérémonie était un peu
tristoune.
"le journal qui l'encense le plus, c’est Le Figaro!"
C'est aussi pour souligner que Renaud reste à
part, dans l'industrie du disque?
C'est un phénomène. Je ne pense pas que Maître Gims, que je
ne déteste pas, fera une carrière équivalente. Des carrières
comme Renaud, ce sera difficile à rééditer.
Il est extrêmement populaire, générations et milieux
confondus. Il n'est pas dans les
Inrocks ni dans
Libé non plus, le parisianisme n'est pas très
tendre vis-à-vis de lui.
Dans
Télérama encore, il a eu de très bonnes
critiques. Bizarrement, le journal qui l'encense le plus,
c’est Le Figaro!
Il a "réussi à fédérer une France que lui seul
parvient encore à réunir", dites-vous.
Renaud a une dimension politique. Il y a une conscience
sociale importante dans ses chansons et son public le
ressent.
Son chant, c’était une catastrophe, donc il y a eu quelques
grincheux et je peux le comprendre, mais les gens étaient
contents que "ça" existe encore.
Ils ont besoin d’un Renaud, d’un Coluche, de ces artistes
contestataires.
Vous clarifiez son revirement politique dans le
livre...
Macron et Fillon? On lui a prêté l’intention de voter Fillon
alors qu'il avait juste confié, en aparté, qu'il lui
paraissait un honnête homme, pas de chance!
Pour Macron, moi-même étant issu de la gauche même l’extrême
gauche, je ne vois pas bien où était l'alternative.
"Il était temps de réhabiliter notre frère, Thierry"
Vous mettez un terme au "dossier" des dérapages
de votre frère, Thierry, également?
Notre grand frère est un type formidable qui a pu avoir des
déclarations déplacées. Il a réussi à se fâcher avec
l'ensemble du show-business.
Il était temps de le réhabiliter. La presse à scandales en a
écrit des lignes et des lignes, il fallait que ce soit dit.
Vous laissez planer le doute: une nouvelle
tournée serait possible?
Je n’aurais pas parié un kopeck sur un nouvel album! Donc je
ne m’engagerai pas sur un nouveau pari mais, avec Renaud,
rien n’est planifiable.
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Renaud, tournée générale!
David Séchan et Stéphane Loisy.
Editions Gründ. 268 pages. 29,95€.