Lettre de à Renaud Gérard Lebovici |
Champ
Libre à Renaud Séchan
Le
11 septembre 1980
Monsieur,
J’ai
bien noté la naissance de votre fille,
et vous en félicite sincèrement,
malgré le goût douteux de votre faire-part publicitaire.
Je ne
m’étonne pas que vous n’ayez plus le goût et le style dont
vous avez fait preuve naguère dans vos chansons. J’ai senti qu’il y avait chez
vous quelque chose de faible et de factice dès l’instant oùvous
avez refusé de faire une chanson en faveur de Mesrine,
quand il était encore traqué, et même sa mort n’a pas ému votre indifférence.
Dès
la parution de votre livre à Champ Libre,
j’ai été complètement confirmé dans mon impression par la bassesse de
l’interviewa que vous avez accordée aux
Nouvelles Littéraires et vous savez bien
que, depuis lors, j’ai fait répondre
constamment à vos nombreuses sollicitations
que je ne pouvais vous recevoir.
Vous
avez depuis mérité le mépris de beaucoup de gens moins exigeants que moi en répondant si prudemment et si humblement quand les
staliniens vous ont attaqué, au lieu de dire d simplement qu’on ne peut qu’être
fier d’être mal vu par des charognes staliniennes . Je suppose que c’était pour
ne pas déplaire à votre ami Coluche, que vous
aimez mieux que votre public,
parce que vous le trouviez lui, assez bon pour vous.
Quand
je vous avais proposé de réunir les textes de vos chansons dans un livre, vous m’aviez d’abord répondu, faisant le
modeste comme vous le faites toujours
avec tous les cons de journalistes,
que vous n’étiez peut être pas digne de figurer dans cette maison
d’édition. La suite a montré, que sur ce point, vous aviez raison.
Il
faut donc m’oublier, faire part des naissances de vos prochains enfants aux
personnes concernées et admettre l’évidence que es menteurs staliniens
, heureusement, ne sont pas les seuls à vous dire « Nous n’étions pas du même
camps »
Gérard Lebovici.
Réponse définitive et sans appel
de Renaud à
Gérard Lebovici
|
Renaud Séchan à Champ Libre
le 7
novembre 1980
Grand
con,
Je m’attendais depuis quelques temps à
recevoir une de ces lettres d’insultes dans lesquelles tu excelles et qui te
permettent pour un instant de t’imaginer écrivain. J’y réponds avec retard, triste bureaucrate malheureux, mon boulot ne
pouvant pas attendre, ta connerie si .
Grand con, cette lettre m’a un peu déçu. Tu
aurais pu trouver des arguments plus frappants pour justifier ton mépris. Que tu n’aies pas d’humour, je le savais, et
le fait que tu n’apprécies pas mon faire-part ne m’étonne guère. D’autre part,
je n’ai pas trouvé trace dans mes archives d’une quelconque interview accordée aux
Nouvelles Littéraire, mais simplement d’un article qui m’est consacré et dont
la teneur et les propos, quelque peu débile il est vrai, n’engagent que le journaleux qui a rédigé ce
papier. Je peux, par contre, te faire parvenir
quelques coupures de presse qui t’édifieraient quant à la connerie
des propos qui’ il m’est arrivé de tenir lors d’interviews. Je ne suis ni un théoricien,
ni un philosophe, ni un beau parleur, et je n’ai ni ta verve, ni ta faculté à
envoyer chier nos contemporains, staliniens ou pas.
J’ai par contre la chance d’écrire des
chansons qui ont ( je te cite) « conquis
l’audience de la jeunesse sauvage », et cette jeunesse, elle, m’est
fidèle. Même si je mène parfois ma carrière avec maladresse, faisant trop de
concessions aux médias, « l’admirable
public qui s’est levé pour moi » est de plus en plus nombreux et, s’il te connaissait, grand con, il aurait vite
fait de considérer que c’est toi, triste bureaucrate mondain, qui es indigne de
publier mes textes. Cztte jeunesse sauvage que tu ne connais pas, ces
jeunes prolétaires que tu ne fréquentes pas, ces enfants de Mesrine
qui fredonnent mes chansons dans leurs prisons quand ce n’est pas moi qui vais
le leur chanter, et même les
« enfants nihilistes des néo-collèges », tous ceux-là te
chient à la gueule.
Enfin, sache, grand con, que je n’ai jamais écrit
une chanson sur commande, que personne ne me dictera ce qu’il serait bon ou
mauvais pour moi d’écrire. Cette chanson sur Mesrine
que tu me reproche de ne pas avoir écrit à l’époque, comme tu semblais
l’exiger, despote, sache que je l’ai écrite depuis, lorsque j’en ai eu l’envie,
la possibilité, l’inspiration. Elle sera sur mon prochain disque. Jz tz rappelle que le précédent
était dédié à Paul Toul dernier nom que porta Mesrine,
à l’époque ou ton courage se limitait à palabrer sur lui dans tes salons.
Tiens-toi donc au courant, grand con, au lieu
de te terrer dans ton bureau sinistre en donnant consignes à ta blondasse de me
faire croire à ton absence. Tu n’as pas d’ couilles, Lebo,
alors toi aussi oublie-moi vite, et ne t’avise pas à me renvoyer une de tes
pauvres bafouilles de merde ou tu goûteras certainement dans ta sale
tronche à quelques paires de Santiag’ à
bouts pointus qui, elles, n’auront rien de faibles ou de factices.
Puisque
tu es devenu visiblement la sous-merde que tu étais déjà essentiellement, mon public, ma gonzesse, mon enfant et
moi-même te crachons à la gueule.
Adieu
grand con.
Renaud
Séchan
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